SUD CT 38 a fait part de son total désaccord sur la mise en place de ce Complément Indemnitaire Annuel. Pourquoi ? Parce que le CIA n’est ni plus ni moins qu’une « prime au mérite » personnalisée qui ne dit pas son nom. Elle risque fort de mettre les agent.e.s d’un même service en concurrence et de casser les collectifs de travail. En effet, cette indemnité « tient compte de l’engagement professionnel et de la manière de servir, appréciée lors de l’entretien professionnel » c’est à dire lors de l’évaluation annuelle individuelle de l’agent.e.
Or, comment apprécier et évaluer le travail individuel d’un agent sans tenir compte de conditions de travail dépendant à la fois de l’employeur, du service, des moyens mis à disposition, de la chaîne hiérarchique et notamment d u management et des compétences métier du N+1 ? Pour SUD C.T., l’agent.e au travail n’est pas un individu isolé fonctionnant dans une bulle étanche ! Le produit de son travail est avant tout la résultante d’une dynamique collective.

Pour rappel le nouveau régime indemnitaire appelé RIFSEEP (Régime Indemnitaire tenant comptes des Fonctions, des Sujétions, de l’Expertise et de l’Engagement Professionnel) est composé de deux parts :
- une part fixe, c’est l’IFSE (Indemnité de Fonctions, de Sujétions et d’Expertise) adoptée et mise en place en 2019 au Conseil Départemental,
- une part variable, c’est le CIA (Complément Indemnitaire Annuel) actuellement en cours de construction au sein de la collectivité.
Il ne faut pas perdre de vue que l’attribution de cette prime sera totalement remise en question chaque année pour chacun et chacune. Ainsi, l’agent.e gagant.e une année, peut se retrouver perdant.e les années suivantes en fonction de son évaluation personnelle... et bien sûr de ses rapports avec celui ou celle qui l’évalue ! Et dans ce système qui gratifiera le « mérite », les « talents », « l’exceptionnel »... c’est sans espoir pour celles et ceux qui oseront interroger le sens, les moyens, l’organisation du travail !
Ce dont ont besoin les agents de la fonction publique, c’est :
• la revalorisation du point d’indice gelé depuis plus de dix ans,
• le rattrapage de ces années perdues,
• l’attribution de points supplémentaires alors que nos salaires décrochent par rapport au privé.
C’est sur ce point d’indice que nous cotisons pour la retraite, à la différence du RIFSEEP qui n’apporte rien à ce niveau !
Nous savons que le « dialogue social » avec les décideurs (élu.e.s et directions) est bien souvent étroit, trompeur et verrouillé… On l’a encore vu lors des négociations sur l’IFSE. Deux exemples parmi d’autres : n’ont été entendues ni nos remarques sur l’accroissement des inégalités au sein du Département entre les salaires des agents de A1 à C3, ni nos observations sur le classement injuste de certains métiers dans des groupes fonctions. Comme bien souvent, les décideurs construisaient le projet, déterminaient les critères et décidaient du montant du budget entre eux. Quelles marges de dialogue et d’évolution pour les syndicats dans de telles conditions ? Le D.G.A. Ressources nous rappelle au besoin qu’« on n’est pas dans la cogestion ». Ça c’est sûr !
Face aux décideurs, sans la force du collectif et sans bâtir un contre-pouvoir avec les agent.e.s, les organisations syndicales ont des marges de manœuvres réduites et peuvent difficilement peser.
- Un CIA identique, attribué à toutes et tous, quel que soit la catégorie pour ne pas creuser les écarts de salaire et alimenter la concurrence. L’administration nous répond « hors de question ! », elle préfère valider l’accroissement des inégalités !
- A défaut, SUD C.T défendra le principe suivant : définir les critères d’attribution du C.I.A. à partir d’objectifs collectifs pour tout un service, communs à une équipe de travail et définis par l’équipe elle-même avec son manager, ce pour éliminer toute concurrence malsaine entre collègues.
Que penser du projet de l’administration favorable au versement d’une indemnité dès lors qu’un agent, désigné par son N+1, en remplace un autre depuis au moins 30 jours consécutifs tout en continuant à assurer ses propres missions ? Avec un tel C.I.A :
Attention à ce que la collectivité n’en profite pas pour s’abstenir de recruter, même sur des courtes durées. La R.H. nous assure que les enveloppes financières consacrées aux remplacements ne seront pas réduites : oui mais nous considérons qu’elles sont déjà insuffisantes et si la collectivité peut encore faire économies sur le dos des salarié.e.s elle ne s’en privera pas.
Attention que cela ne serve pas de substitut incertain aux nécessaires revalorisations salariales d’une grande partie des agent.e.s. Attention aux disparités qui vont s’accroître entre agent.e.s de catégories et de grades différents : les plafonds réglementaires attribuent peu aux catégories C et beaucoup aux A+ (près de 8 fois plus !)
Négocier des critères d’attribution individuels, à partir de réalités de travail multiples et diverses, c’est donner naissance à une usine à gaz produisant à coup sûr rancœur, déception et incompréhension plutôt qu’entraide, solidarité et sentiment de justice collective.
En s’opposant à cette prime au mérite, SUD C.T. a conscience d’aller à rebours de l’esprit du temps, de la demande d’individualisation à outrance de notre société et des référentiels délétères que les politiques et directions R.H. cherchent à introduire dans le monde du travail d’aujourd’hui. Faire du copier/coller d’outils de management et d’organisations du travail issus de l’entreprise privée, sans tenir compte des retour s d’expériences négatifs, n’améliore pas le travail des agent.e.s ni la qualité du service public.
Au lieu du travailler plus pour gagner plus, SUD C.T. 38 réclame des remplacements effectifs et rapides lorsqu’un.e collègue est absent.e. SUD C.T. milite aussi pour un partage du travail et des richesses plus égalitaire… donc un tout autre projet de société et d’organisation du travail.